PATRICK OU L'IMPOSSIBLE RENCONTRE

Par un matin de printemps, je partais travailler à environ 30 kilomètres de chez moi pour une durée déterminée de cinq jours. J'allais travailler à la Ferme du Buisson à Noisiel pour le festival Made-in-bel-gique où se trouvait Patrick C. Un seul but en tête, rencontrer mon héros et éclaircir une sombre histoire.
Tout était très bien organisé : Une charmante caravane m'attendait sur place.
J'avais tout prévu : Débardeurs pliés et soigneusement rangés dans mon sac à dos. Tout était fin prêt pour la rencontre.
A mon arrivée, Patrick était déjà là, accompagné de sa dame. Son travail à lui, était d'occuper les locaux du centre d'art de la ferme par une exposition appelée : Le retour du promeneur solitaire. Mon travail à moi était simple, faire la vaisselle 5 heures d'affilée à l'entrée de la cantine des artistes. Comblée, je pouvais espionner mon héros à mon aise. Ce séjour était ponctué par des moments de détente et le soir sous le chapiteau de grandes beuveries étaient organisées.
Le deuxième jour, vers 1 heure du matin, l'alcool ayant fait son travail, je me jetais à l'eau et amorçais la rencontre :
" Bonjour, vous vous souvenez de moi ? "
Patrick me regarda et ouvrant les bras s'écriait :
" Paris VIII !
- ... Albi, le musée du Caïla... il y a un moment déjà, quelques années...
- 1997. 17 mai 1997 !
Ne me laissant rien ajouter, mon héros tourna les talons et repartit en dansant.
Le lendemain, durant ma pause, j'allais voir un spectacle avec un ami. Nous attendions dans la salle, assis et énervés parlant très fort :
" A midi, à la cantine, Patrick ne m'a pas dit bonjour, oulala, quelle histoire, oulala !" Deux rangs devant sur notre gauche, Patrick et sa dame étaient là et nous regardaient stupéfaits.
Plus tard, je reprenais le service à la cantine et mon travail. Honteuse, je décidais de ne pas lever les yeux et de rester durant le déjeuner concentrée sur les centaines de verres et d'assiettes à nettoyer. Si la rencontre n'était pas non plus prévue pour aujourd'hui, il valait mieux m'effacer.
Peu de temps après, mon héros et sa compagne faisaient leur entrée dans la cantine et s'arrêtaient devant mon plan de travail pour parler avec la serveuse qui arrivait un plateau rempli de vaisselle sale. Ils l'accostèrent au moment où elle me tendait le tout. Ayant décidée de ne pas lever les yeux, j'attrapais le plateau ou plutôt ne le rattrapais pas et laissais tomber sur le sol et sur sa dame en un énorme fracas une carafe pleine d'eau.
J'étais finie. J'étais devenue leur cauchemar : le Patrick Batman d'American Psycho. De retour à Paris, j'allais boire un verre au relais des Pyrénées avec une amie et lui racontais tout. Elle ne dit rien, et sortit de son sac un bout de papier sur lequel était inscrit une petite annonce.